Lettre ouverte adressée à Monsieur l'auditeur militaire de garnison Beni-Butembo,
SYNTHÈSE DE LA TROISIÈME AUDIENCE DU PROCÈS DU MEURTRE DU MILITANT DE LA LUCHA FREDDY KAMBALE
Mise en ligne le 25 juin, 20 à 10:23
Ce mercredi 24 juin 2020 s’est poursuivi le procès du meurtre de Freddy Kambale Luhindo, militant de la LUCHA tué le 21 Mai 2020 lors d’une manifestation pacifique dénonçant la persistance de l’insécurité à Beni. L’audience du jour a été consacrée essentiellement à l’audition de trois policiers et un expert en balistique, tous cités par le prévenu en tant que témoin.
Le Policier Penda Tcheko de la LENI (Légion Nationale d’intervention) a été auditionné en premier en tant que renseignant. Il avait été cité par le prévenu Ombeni comme ayant été sur terrain avec lui lors de la répression du 21 Mai et que de ce fait, il est à mesure d’attester ses propos, notamment le fait que ce n’est pas lui le meurtrier. Contrairement aux allégations du prévenu, le renseignant a affirmé n’avoir pas été de l’équipe descendue sur terrain à Kalinda lors de la marche de la LUCHA du 21 Mai 2020 mais il était resté à l’Etat major de la police. Le renseignant a reconnu avoir plutôt été témoin de l’inspection des armes des policiers revenus du terrain pour découvrir ceux qui avaient tirés parmi eux. C’est ainsi que deux policiers avaient été arrêtés pour avoir fait usage de leurs armes, dont le prévenu Ombeni. Réagissant aux propos du renseignant, le prévenu a reconnu n’est pas se rappeller si le renseignant été effectivement à Kalinda, remuant ainsi ses anciennes déclarations.
Après le policier Penda Cheko, c’est le policier Noël qui a été entendu en tant que renseignant au sujet des accusations portées contre lui par le prévenu Ombeni. En effet, lors des précédentes audiences, le policier Noël avait été accusé par le prévenu d’avoir tué Freddy Kambale et d’avoir uriné dans le canal de son arme pour dissimuler les preuves. Le prévenu avait en plus soutenu que le policier Noël bénéficie de la protection de la hiérarchie policière pour des raisons tribales. Le policier Noël a retracé le déroulement des évènements du 21 Mai 2020 de l’Etat major de la police au stade de Kalinda en passant par le stade Butsili. Dans son récit, il a repris in textio les propos du colonel KABEYA et du major IREBU qui avaient été entendus au cours de deux premières audiences. Le policier Noël a rejeté toutes les accusations portées contre lui par le prévenu. Il a dit notamment n’avoir pas tiré lors de la descente de la police à Kalinda pour disperser les militants de la LUCHA. Son arme n’avait que 30 balles et lors du décompte final, c’était toujours le même nombre de munitions a-t-il soutenu. En plus, il affirme n’avoir pas uriné dans son arme. C’était probablement lorsqu’il était allé au toilette que son arme avait pris l’odeur des urines mais ce n’était pas fait volontairement pour cacher une quelconque preuve. Réagissant aux propos du renseignant, le prévenu a affirmé que le policier Noël n’a fait que mentir et qu’il bénéficie de la protection de sa hiérarchie.
Après les deux policiers, un troisième renseignant a été entendu. Il s’agissait notamment de l’expert en balistique, requis par le ministère public pour examiner l’arme et confirmer si elle avait tiré ou pas. Le renseignant a effectivement confirmé que son rapport d’expertise versé au dossier disant que l’arme avait tiré est vrai. Pour soutenir son rapport d’expertise, l’expert a démonté l’arme du policier Ombeni en pleine audience montrant une poussière huileuse noire sortie de l’arme, prouvant que l’arme avait effectivement tiré. Il a aussi affirmé devant le tribunal qu’au vu de ses observations, cette arme avait tiré moins de 5 balles. Réagissant au rapport d’expertise et aux propos de l’expert, le prévenu a encore une fois rejeté tout en bloc, alléguant n’avoir jamais tiré avec son arme depuis sa sortie du centre de formation à Kinshasa il y a une année environ. Il a affirmé que si le rapport balistique est vrai, c’est probablement sa hiérarchie qui avait tiré avec son arme pour le clouer. La défense a exigé de ce fait que l’arme du policier Noël soit aussi soumis à l’expertise balistique sur place pour voir si réellement il n’avait pas tiré aussi. La demande a été rejeté par le tribunal, qui a estimé que le policier Noël n’est pas poursuivi dans le cadre de l’affaire en cours mais pour une autre infraction de dissipation des munitions.
Enfin, le tribunal a auditionné le policier Zihalirwa à titre de renseignant. En effet, lors des audiences précédentes, le policier Zihalirwa avait été cité par le prévenu comme ayant été avec lui durant toute la mission de répression de la marche de la LUCHA et pouvant donc soutenir sa version des faits, y compris le fait qu’il n’est pas l’assassin de Freddy Kambale. Le policier Zihalirwa a fait savoir au tribunal qu’il était effectivement avec le prévenu Ombeni aussi bien à l’état major, qu’au stade de Butsili et au stade de Kalinda. Il avait même vu comment le Commissaire Maloti, responsable de l’unité LENI, avait ravi la lance bombe au prévenu Ombeni quand celui ci avait tiré en désordre. Néanmoins, le policier Zihalirwa a affirmé qu’après les tirs de deux premières bombes lacrymogènes, il s’était séparé du prévenu Ombeni et n’avais plus vu ses mouvements. Le policier Zihalirwa a dit n’est pas pouvoir être à mesure de certifier si le policier Ombeni s’était effectivement soustrait du groupe d’autres policiers ou s’il était revenu poursuivi par une femme l’accusant d’avoir tué un manifestant car il était occupé à encercler les militants de la LUCHA resté assis. Réagissant aux propos du policier Zihalirwa, le prévenu Ombeni a encore une fois soutenu qu’il était pendant toute la durée de la mission, au côté du policier Zihalirwa, Ce que ce dernier a rejeté, affirmant l’avoir abandonné derrière lui juste après le lancement des premières bombes lacrymogènes.
Après audition de tous les renseignants, toutes les parties se sont mis d’accord sur une descente sur terrain à Kalinda pour revivre les évènements du 21 mai. Ainsi, les parties se sont mis d’accord pour une remise à la huitaine, le temps de régulariser la procédure. La prochaine audience est donc prévue pour le 01 juillet 2020 pour la descente sur terrain et l’audition de l’expert médical.
Fait à Beni, le 24 juin 2020
SMK