Le Conseil National de Suivi de l’Accord et du processus électoral (CNSA)

Mise en ligne le 27 juillet, 19 à 13:01


Le Conseil National de Suivi de l’Accord et du processus électoral (CNSA): une institution inutile, caduque et obsolète ; à supprimer purement et simplement !

Le 31 décembre 2016, les représentants des composantes de la Majorité Présidentielle, de l’opposition politique, de la société civile signataire de l’accord du 18 octobre 2016 de la cité de l’Union Africaine, d’une part, et du Rassemblement, du Front pour le Respect de la Constitution et de la société civile non signataire du dit accord, d’autres part ; signaient, sous la médiation des évêques de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) l’accord politique global du centre interdiocésain de Kinshasa.

Cet accord fut la résultante des efforts consentis par toutes les forces vives de la nation pour éviter l’implosion du pays à cause de la crise politique née de l’impasse qui gangrénait le processus électoral.

Pour faciliter la mise en œuvre du dit accord, les parties prenantes s’étaient engagées à mettre en place une institution d’appuie à la démocratie appelée Conseil National de Suivi de l’accord et du processus électoral1 conformément à l’article 222 de la Constitution.2

La mission générale de suivi de l’application de l’accord consistait pour cet organe d’assurer le suivi du chronogramme mis en œuvre par l’accord ; réaliser les évaluations régulières du processus électoral ; communiquer régulièrement l’état d’avancement de la mise en œuvre de l’accord ; formuler des recommandations respectivement au parlement, au Gouvernement et à la CENI pour la bonne exécution de l’accord ; assurer le règlement d’éventuelles divergences nées de l’interprétation de l’accord entre les parties prenantes et concilier leur points de vue à cet égard…

Malencontreusement, le contexte politique de l’installation de cette institution, l’a débridé de son sens dès sa genèse et a planté le décor de son inefficacité qui s’en était suivie. Ce contexte politique fut celui d’un marchandage politique3 caractérisé par le débauchage et le dédoublement des opposants au régime.

Alors que l’accord politique global et inclusif du Centre interdiocésain prévoyait que le CNSA devrait être présidé par le Président du conseil des sages du Rassemblement (vaste plateforme politique qui regroupait les forces politiques de l’opposition, principalement de la mouvance katumbiste et Tshisekediste), la mort inopinée d’Etienne TSHISEKEDI, alors Président de l’UDPS et du comité des sages du rassemblement, provoqua une cacophonie dans le rang de cette plateforme. Sa succession fut le principal point d’achoppement. A l’issue des âpres discussions entre-elles, les neuf forces politiques membres de cette plateforme trouvèrent la formule : ils désignèrent Félix TSHISEKEDI (fils de l’opposant historique Etienne TSHISEKEDI) Président de la branche politique et Pierre LUMBI (proche collaborateur de MOISE KATUMBI) Président du Conseil de Sage. Cette formule ne fut aucunement l’unanimité dans le chef de certaines personnalités dudit regroupement qui décidèrent de fronder.

Face au régime de Joseph en quête perpétuelle des mécanismes de survie politique, les frondeurs composés principalement de Joseph OLENGAKOY Président du Parti FONUS, alors membre de la Dynamique ; LISANGA BONGANGA, alors membre du front du peuple (un mouvement des alliés de TSHISEKEDI) et de Bruno TSHIBALA cadre de l’UDPS et ancien proche collaborateur d’Etienne TSHISKEDI, furent débauchés pour dupliquer le rassemblement.

C’est dans le rang de ces frondeurs que sera désigné le Président du CNSA. Comme on pouvait s’y attendre, les prémices étaient mauvaises, la masse l’a été aussi. Cette institution issue du débauchage n’a réussi à jouer efficacement son rôle de faire appliquer l’accord du centre interdiocésain.

Plusieurs situations illustrent cette inefficacité opérationnelle, notamment:

  • Le non respect du calendrier électoral : selon les prescrits de l’accord politique global et inclusif4, les parties prenantes s’étaient convenues de l’organisation des élections une seule séquence au plus tard le 31 décembre 2017. Pour ce faire, elles avaient chargé le CNSA d’organiser convenablement les évaluations régulières avec la CENI et le Gouvernement afin de se rassurer du respect du calendrier électoral. Malheureusement, ce CNSA dépouillé de tout poids politique réel puisqu’issu du débauchage, n’a organisé que des évaluations de formalité pour gober les avis de la CENI et du Gouvernement. La conséquence c’est que ces élections prévues au plus tard pour le 31 décembre 2017 ont été organisé une année après, soit le 31 décembre 2018.

  • Le non redynamisation de la CENI : les parties prenantes à l’accord du saint sylvestre s’accordaient de la redynamisation de la CENI puisque sa configuration hypothéquait son indépendance et son impartialité. Elles chargeaient à cet effet, le CNSA de recommander5 tous les ajustements et les mesures à prendre tant en ce qui concerne les structures organiques que le fonctionnement de la CENI d’une part, et les mécanismes appropriés à mettre en place en vue notamment de renforcer ses capacités et la transparence des opérations préélectorales et électorales d’autre part dans les plus brefs délais. Chose que ce CNSA n’a aucunement fait.

  • La décrispation à géométrie variable de l’espace politique : au chapitre de la décrispation de l’espace politique qui était très tendu, les parties prenantes adoptèrent une gamme des mesures parmi lesquelles : la libération des prisonniers politiques dont les cas emblématiques d’Eugene DIOMI NDONGALA, Jean-Claude MUYAMBO, la cessation des poursuites contre Moise KATUMBI et la facilitation de son retour au pays ; la réouverture des médias de l’opposition fermés ; l’arrêt des poursuites judiciaires injustifiés dues aux tracasseries fiscales à l’encontre des certains membres de l’opposition6. Tristement, ces mesures furent exécutées pour certains cas, et torpillées pour d’autres, sous le regard impuissant du CNSA.

Ce bilan largement négatif du CNSA, qui a participé au massacre de l’accord politique qui l’a enfanté, consacrait son inutilité depuis très longtemps.

Maintenant qu’il y a eu retour à l’ordre constitutionnel avec l’organisation des ‘’élections’’7, quatre raisons principales militent en faveur de son obsolescence et de sa caducité :

  • Raisons jurisprudentielles : en RDC, l’accord global et inclusif du 17 décembre 2002 et la Constitution de la Transition du 1 avril 2003 avaient prévu cinq institutions citoyennes ou d’appui à la démocratie (CEI, ONDH, HAM, CVR, CELC8). A la fin de la transition couronnée par l’organisation des élections de 2006, ces institutions mises en place par des composantes et entités signataires de l’Accord Global et Inclusif étaient logiquement appelées à disparaitre pour laisser place aux nouvelles. Cet ainsi que deux d’entre elles ont été dissoutes et trois autres reconverties à raison de la pertinence et la continuité de leur mission. Il s’agit de la CEI devenue CENI, ONDH devenu CNDH, HAM devenu CSAC. Contrairement aux institutions d’appui à la démocratie qui ont survécu à cause de la pertinence et la continuité de leur mission, le CNSA est appelé à la dissolution au même titre que le CELC et le CVR. A cause du bilan largement négatif et la temporalité de sa mission.

  • Raisons politiques : les membres du CNSA, surtout ceux débauchés dans le rang de l’opposition et qui assument des fonctions importantes que c’est soit dans le bureau et la plénière, n’ont pas d’assises politiques voulues par l’esprit de la création de cette institution. Je rappelle que la personne d’Etienne TSHISEKEDI, désigné pour ce poste fut un grand baobab de la scène politique congolaise. l’opposant historique, a été désigné pour jouer un contre poids au Gouvernement et à la CENI pendant la transition. Un homme comme ça, on ne le remplace pas par des débauchés, puis s’attendre aux mêmes résultats.

  • Raisons économiques : le fonctionnement de cette institution à 28 membres, coute de millions à la République. Maintenant que sa mission est dépassée, elle est devenue budgétivore et trop pesante pour le Trésor public. L’argent dépensé pour son fonctionnement peut être orienté dans les dépenses d’investissement pour développer la nation congolaise qui accroupit dans sa grande majorité, dans la misère la plus totale. Aucune logique rationnelle ne pourrait conduire à la continuité de cette institution, si c’est ne pas le clientélisme.

  • Raisons stratégiques et opérationnelles : la mission principale du CNSA était celle du suivi de la mise en œuvre de l’accord et du processus électoral. La première partie de sa mission est complètement terminée. Malgré qu’elle n’a réussi à l’atteindre. La deuxième partie qui est le suivi du processus électoral est en grande partie terminée, et revient naturellement et constitutionnellement à la CENI. Le Gouvernement et le Président de la République peuvent en assurer le Contrôle, histoire de se rassurer l’effectivité.

Eu égard à tout ce qui précède, nous formulons des recommandations suivantes :

  • Au Président de la République, Monsieur Félix TSHISEKEDI TSHILOMBO en sa qualité de garant de bon fonctionnement des institutions et symbole de la Nation ; d’initier la dissolution pure et simple du CNSA.

  • Au parlement : d’initier des actions parlementaires pour la suppression pure et simple du CNSA conformément à l’article 222 de la Constitution.

  • Au président du CNSA : de déposer purement et simplement sa démission au près du Président de la République pour sortir par la petite porte au regard du bilan négatif de son actif.

  • Aux forces politiques et sociales pro-changement :d’initier une campagne nationale dénommée ‘’Front pour la dissolution du CNSA’’ afin de mener des actions pacifiques de grande envergure pouvant aboutir à la dissolution de cette institution.

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Fait à Kisangani/RDC le 25 juillet 2019

Par Jedidia MABELA ENGOMBA

Politologue de formation

Activiste pro-démocratie,

Militant du mouvement citoyen LUCHA

1 Accord politique global et inclusif du centre interdiocésain de Kinshasa, 2016. Page 18.

2 Article 222 de la Constitution : « les institutions politiques de la transition restent en fonction jusqu’à l’installation effective des institutions correspondantes prévues par la présente constitution et exercent leurs attribution conformément à la Constitution de la transition la Transition. Les institutions d’appui à la démocratie sont dissoutes de plein droit dès l’installation du nouveau Parlement. Toutefois, par une loi organique, le Parlement pourra, s’il échet, instituer d’autres institutions d’appui à la démocratie ».

3 A lire à ce sujet, la notion du mercato politique évoqué par MABELA ENGOMBA JEDIDIA dans « Nationalisme et légitimité du Régime de Joseph KABILA, de 2011 à 2016 », mémoire inédit, Sciences politiques et administratives, Université de Kisangani, année académique 2016-2017.pages 60-65.

4 Accord politique global et inclusif, op cit, page 9.

5 Accord politique global et inclusif, op cit, page 9.

6 Il importe de signaler que pour le cas de Moise KATUMBI, les parties prenantes, sous réserve de la Majorité Présidentielle, s’étaient accordées de charger la CENCO de poursuivre les bons offices auprès de toutes les autorités concernées pour le suivi et la résolution effective.

7 Ici encore, il sied de signaler le rôle nocif joué par le CNSA dans l’entourloupe électoralQe de décembre 2018 en RDC. En amont, il a avalisé sans vergogne l’usage de la machine a voté non initialement prévue ni par la Constitution, ni par la loi électorale, encore moins par le Calendrier de la CENI ; IL a observé impuissamment l’exclusion de l’opposant Moise KATUMBI et le rejet de la candidature de l’opposant Jean-Pierre BEMBA, tous candidats à l’élection présidentielle. En aval, il a assisté malicieusement à la vénalité des résultats électoraux proclamés par la CENI puis avalisés par la Cour Constitutionnelle.

8 CEI : Commission Electorale Indépendante ; ONDH : Observatoire National des Droits Humains ; HAM : Haute Autorité des Médias, CVR : Commission Vérité et Réconciliation ; CELC : Commission de l’Ethique et de la Lutte contre la Corruption.


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