Lettre ouverte  au Président de la République Démocratique du Congo au sujet de la situation sécuritaire dans la région de Beni

Mise en ligne le 16 octobre, 20 à 00:09


Monsieur le président,

La nuit du mercredi 15 octobre 2014 , 33 habitants du quartier Ngadi en commune Ruwenzori dans la ville de Beni étaient tués au cours d’une attaque armée. Six ans après ce tragique événement qui a marqué le début d’une serie de tueries en pleine ville de Béni, toute la région de Béni est toujours secouée par une série de massacres, pillages enlèvements, incendies dont les auteurs présumés sont les ADF.

L’insécurité est à la base de la mort, essentiellement à l’arme blanche, de plus de 4000 civils sans compter les scènes répétitives de kidnapping de centaines d’autres civils. Les survivants voient leurs villages incendiés et sont obligés de fuir vers les entités relativement sécurisées, avec comme conséquences la difficulté d’accès aux champs, principal activité économique locale et la destruction du tissu social et économique local.

Monsieur le président,

L’insécurité et son lot des consequences économiques est en ces jours, le principal défi auquel votre gouvernement devrait faire face pour redonner espoir à la population qui se sent délaissée par le gouvernement central. A travers cette lettre, notre mouvement tient à vous transmettre des propositions pratiques pour la construction d’une paix durable.

Notre mouvement a toujours estimé que le rétablissement de la paix et le retour de la sécurité à Beni passent par le renforcement des operations militaires, la protection des civils par une police locale, la justice pour les victimes et le relancement des activités socio-économiques.

Le renforcement des opérations militaires

Monsieur le président,

En ce jour, la bataille contre les tueurs de Beni est menée par les FARDC. Il est triste de constater que malgré la forte logistique et une supériorité numérique de ses hommes par rapport aux rebelles, les FARDC et la MONUSCO ont échoué à neutraliser les présumés ADF et la mosaïque des milices locales qui insécurisent la population. Plusieurs sources, y compris au sein des forces armées loyalistes allèguent des actes de complicité de certains éléments FARDC avec les tueurs, rendant ainsi la lutte contre ceux-ci difficile.

Monsieur le president,

Le changement de stratégie est nécessaire. On ne peut pas véritablement compter sur un système de défense bâti sur les FARDC et la MONUSCO dans leur configuration actuelle. Ainsi, il faut de toute urgence :

– Révéler toutes les autres troupes de la MONUSCO présentes dans la région de Beni sauf la brigade d’intervention de l’ONU créee en 2013 qui devra être transformée en une Force régionale et la renforcer en troupes et en moyens, avec pour mandat d’assurer la protection effective des civils, traquer les auteurs des massacres et stabiliser la région de Beni sur le modèle de l’opération Artémis menée il y quelques années en Ituri ;

– Installation de l’Etat major des Forces Armées de la République Démocratique du Congo à Beni en vue de suivre de plus près la situation de Beni et intensifier les actions militaires concertées, réfléchies et adaptées aux techniques de guerre de l’ennemi.

– Écarter du commandement tous les responsables officiers accusés d’entretenir l’insécurité et sur qui pèsent des soupçons de violations de droits de l’Homme. En outre, les acteurs sociaux devront être associés aux évaluations mensuelles de la situation sécuritaire avec ;

Mettre en place une police de proximité

La protection des civils reste le domaine dans lequel la stratégie actuelle menée par les FARDC a échoué. Elle en est aussi le talon d’Achille. En effet, depuis le lancement des opérations de grande envergure en octobre 2019, plus 940 personnes ont été tuées. Les ennemis fuient les zones de combat pour venir se rabattre sur la population. Ils égorgent, kidnappent, pillent, brûlent pour terroriser la population. Ils gagnent ainsi une guerre psychologique en rendant vains les efforts des FARDC. Les victoires sur terrain ne sont donc pas synonymes de répit pour la population. Parallèlement aux opérations militaires, il faut:

  • Former et équiper une police locale qui se chargera exclusivement de la protection des civils pendant que les FARDC seront entrain de défendre l’intégrité territoriale. Ces nouvelles unités devront être composées par les habitants dévoués issus des agglomérations à protéger.

  • Mettre toutes ces unités sous le commandement d’un commissariat spécial pour éviter qu’elles ne se transforment pas en milices locales. Cette stratégie permettra de suppléer à la police nationale qui est insuffisante en nombre et faible en logistique pour se déployer dans tous les villages, cités et villes.

Rendre Justice aux victimes des massacres de Beni

Monsieur le président,

Derrière chaque attaque dans la région de Beni, il y a des hommes, des femmes et des enfants qui ont (ou avaient) les mêmes rêves que n’importe quel être humain mais qui les voient s’envoler sans voix. Il n’est pas normal que ces injustices ne soient pas réparées. Les procès des présumés ADF et leurs collaborateurs que la cour opérationnelle a organisé à Beni n’ont été que des simulacres des procès qui ont élevé les bourreaux et humilié davantage les victimes. Pour preuve, des commandants FARDC et des acteurs politiques accusés de complicité avec les tueurs dans différents rapports d’organisations crédibles n’ont jamais été inquiétés. Le besoin de justice pour nous est très grand et il passe notamment par :

  • Une enquête internationale indépendante, impartiale, transparente et rapide pour établir les faits et les responsabilités sur les tueries, les mutilations, les kidnappings, les destructions et les pillages perpétrés dans la région de Beni depuis le 1er janvier 2014,

  • La poursuite en justice des vrais auteurs des tueries, mutilations, kidnappings, destructions et les pillages perpétrés dans la région de Beni depuis le 1er janvier 2014.

  • La mise à la disposition de la justice des responsables politiques et militaires cités dans différents rapports des organismes nationaux et internationaux comme complices des auteurs de l’insécurité à Beni et dans tout l’Est de la République,

  • Un travail de mémoire et homages aux victimes. Nous estimons qu’il est important de garder à cœur cette épisode douloureuse de notre histoire, nous souvenir de ces massacres odieux afin qu’ils ne se reproduisent plus dans notre pays, honorer la mémoire des victimes, renforcer la solidarité nationale/citoyenne avec les survivants en les identifiant par leur nom, et en érigeant un mémorial. En outre le 02 Octobre devra être reconnu comme « Journée du Souvenir pour Beni » pour que jamais l’on ne puisse oublier.

Travailler au relèvement socio-économique

Monsieur le président,

Les attaques dans la région de Beni visent de plus en plus les zones et opportunités à fort impact économique. La zone de Mayangose, grenier agricole de la région de Beni est désormais inaccessible, des véhicules entiers transportant des marchandises sont incendiés, des biens de la population sont systématiquement pillés, …

En plus de cette insécurité, il se constate une très forte pression fiscale et un manque criant d’entretien des routes principales et des dessertes agricoles. Ainsi, ceux qui par chance accèdent à leurs champs, n’ont parfois pas la possibilité d’évacuer leurs produits vers les centres urbains, site de consommation. Bref, c’est toute l’économie locale qui est ébranlée. Il est de ce fait important que les mesures suivantes soient prises :

  • La déclaration de la zone de Beni comme zone sinistrée avec pour conséquence une exonération fiscale totale ou partielle de toutes les activités socio-économiques des habitants de la région;

  • La construction de la route nationale Numéro 2 (Kasindi-Beni-Butembo-Goma) et l’entretien régulier des routes des dessertes agricoles;

  • L’électrification de la région et la subvention par l’Etat de la production, la transformation et la commercialisation de certaines filiaires agricoles (Cacao, huile de palme, maïs, café, quinquina, pomme de terre, haricot, …) afin de pallier au problème du chômage.

Monsieur le président ,

Nous sommes confiants que si les propositions suivantes sont mises en œuvre, il est possible de redonner à cette région son statut de pool du développement de notre province et de notre pays ainsi que redonner à ses habitants le sentiment d’appartenance à la nation. Nous sommes résolument engagés à vous accompagner dans leur mise en œuvre. En tant que mouvement citoyen, nous faisons ce qui est de notre devoir et dans notre pouvoir pour que la bataille pour la restauration de la paix soit gagnée.

Fait à Beni, le 15 Octobre 2020

Pour la LUCHA

La cellule de communication


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