Sécurité, Développement, Santé : nos propositions pour vivifier Beni-Butembo

Mise en ligne le 18 avril, 19 à 07:17


MEMORANDUM DE LA LUCHA/BENI A MONSIEUR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

Monsieur le président de la République,

Depuis 2014, La région de Beni-Butembo est secouée par une série de massacres, pillages, enlèvements, incendies de maisons et véhicules,… dont les auteurs sont les islamistes ADF selon les autorités Congolaises. Cette insécurité est à la base de la mort, essentiellement à l’arme blanche, de plus de 3000 civils, au kidnapping de centaines des civils, à l’incendie des villages et véhicules de commerce, au déplacement des populations vers des entités relativement sécurisées, à la difficulté d’accès aux champs, principal activité économique locale et à la destruction du tissu social et économique local. Au côté de ces « massacreurs islamistes », des milices locales mai mai se présentant comme rempart contre les égorgeurs sévissent dans certaines entités rurales de la région. Bien que ne causant pas assez de torts aux communautés comme les présumés ADF, ces milices sont parfois responsables de plusieurs abus des droits de l’homme.

Sur le plan sanitaire, depuis le 01 Aout 2018, une épidémie d’Ebola a été déclarée dans la province du Nord Kivu précisément à Mangina par les autorités sanitaires notamment le ministère de la santé. L’épidémie s’est vite répandue à travers une partie importante des provinces du Nord Kivu et de l’Ituri faisant un total 1264 cas enregistrés dont 814 décès et 374 guéris (situation épidémiologique au 15 Avril 2019). En ces jours, le grand foyer épidémiologique demeure la ville de Butembo (zones de santé de Butembo et Katwa).

Les menaces sécuritaires et sanitaires exposés ci haut sont en ces jours, les principaux défis aux quels votre gouvernement devrait faire face pour redonner espoir à la population de Beni-Butembo, longtemps délaissée par le régime prédateur de votre prédécesseur. Votre arrivée au pouvoir, bien que posant de sérieux problèmes de légitimité, de morale, de vérité et de justice, a permis de fermer la page sombre de l’ère Kabila et de croire encore à un avenir meilleur surtout au regard de la longue et noble lutte de votre parti pour la démocratie et l’Etat de droit dans notre pays mais aussi des promesses que vous avez faites durant votre campagne électorale. A travers ce mémorandum, notre mouvement tient à vous transmettre des propositions pratiques pour pacifier la région de Beni-Butembo (I), relancer le développement socio économique de cette région (II) et vaincre la terrible épidémie d’Ebola (III). Nous sommes résolument engagés à vous accompagner dans leur mise en œuvre pour qu’en fin, nous ayons aussi le privilège de vivre dignement comme Homme.

  1. RETABLISSEMENT DE LA PAIX ET DANS LA SECURITE

Monsieur le président de la République, notre mouvement a toujours estimé que le rétablissement de la paix et la sécurité à Beni passe par :

  1. Le renforcement des opérations militaires

En ces jours, la bataille contre les tueurs de Beni est menée par les FARDC avec l’appui de la MONUSCO. Il est triste de constaté que malgré la forte logistique et une supériorité numérique de ses hommes par rapport aux rebelles, les FARDC et la MONUSCO ont échoués à neutraliser les présumés ADF et la mosaïque des milices locales qui insécurisent la population. Cela est d’autant plus incompréhensible que certaines milices, comme les présumés ADF, sont localisables sur une aire de moins de 50km2. Plusieurs sources, y compris au sein des forces armées loyalistes allèguent des actes de complicité de certains éléments FARDC avec les tueurs, rendant ainsi la lutte contre ceux-ci difficile. On ne peut véritablement compter sur un système de défense bâti sur les FARDC et la MONUSCO dans leur configuration actuelle. Ainsi, il faut de toute urgence :

  • Révéler toutes les autres troupes de la MONUSCO présente dans la région de Beni sauf la brigade d’intervention de l’ONU qui devra être transformer en une Force régionale et la renforcer en troupes et en moyens, avec pour mandat d’assurer la protection effective des civils, traquer les auteurs des massacres et stabiliser la région de Beni sur le modèle de l’opération Artémis à l’Ituri ;
  • Installation de l’Etat major des Forces Armées de la République Démocratique du Congo à Beni en vue de suivre de plus près la situation de Beni et intensifier les actions militaires concertées, réfléchies et adaptées aux techniques de guerre de l’ennemi
  • Organiser des évaluations participatives mensuelles de la situation sécuritaire avec les autres acteurs sociaux ;
  1. Rendre Justice aux victimes des massacres de Beni  

Derrière chaque attaque dans la région de Beni, il y a des hommes, des femmes et des enfants qui ont (ou avaient) les mêmes rêves que n’importe quel être humain mais qui les voient s’envoler sans voix. Il n’est pas normal que ces injustices ne soient pas réparées. Les procès des présumés ADF et leurs collaborateurs que la cour opérationnelle a organisé à Beni n’ont été que des simulacres des procès qui ont élevé les bourreaux et humilié davantage les victimes. Pour preuve, des commandants FARDC et des acteurs politiques accusés de complicité avec les tueurs dans différents rapports d’organisations crédibles n’ont jamais été inquiétés. Tout en vous remerciant et en saluant la libération et la fin de l’exil pour certains activistes et politiciens accusés faussement de complicité avec les rebelles, nous sommes inquiets de constater que sans moindre enquête ou éléments nouveaux, vous estimiez que l’insécurité à Beni est l’œuvre des islamites ADF. Nous sommes convaincus que la thèse islamiste est un faux fouillant visant à cacher l’implication de certains acteurs politiques et militaires. Nous sommes aussi inquiets de votre rapprochement avec des responsables politiques et militaires sur qui reposent des sérieux indices de complicité avec les tueurs de Beni à la lumière des rapports des organisations internationales et nationales crédibles et des témoignages concordants des rescapés. Le besoin de justice pour nous est très grand et il passe notamment par :

  • Une enquête internationale indépendante, impartiale, transparente et rapide pour établir les faits et les responsabilités sur les tueries, les mutilations, les kidnappings, les destructions et les pillages perpétrés dans la région de Beni à partir du 1er janvier 2014
  • La poursuite en justice des vrais auteurs des tueries, les mutilations, les kidnappings, les destructions et les pillages perpétrés dans la région de Beni à partir du 1er janvier 2014
  • La mise à la disposition de la justice des responsables politiques et militaires cités dans différents rapports comme complices des auteurs de l’insécurité à Beni et dans tout l’Est de la République,
  1. Rendre hommage aux victimes et garder la mémoire

Malgré l’atrocité qui les caractérise et le nombre impressionnant des morts, les massacres de Beni ne retiennent malheureusement pas l’attention des officiels Congolais. Aucun hommage national ou une forme de solidarité de la nation n’a jamais été exprimée aux milliers de morts tombés pourtant à cause de l’irresponsabilité des autorités. Nous estimons qu’il important de garder à cœur cette épisode douloureuse de notre histoire, nous souvenir de ces massacres odieux afin qu’il ne se reproduise plus jamais dans notre pays, honorer la mémoire des victimes, renforcer la solidarité nationale/citoyenne avec les survivants. Vous vous êtes même recemment inclinés au mémorial des victimes du génocide Rwandais, preuve de votre attachement à la question de la mémoire et à l’hommage aux morts. Nous estimons pour ce fait qu’il est important que :

  • Toutes les victimes soient identifiées par leur nom, et un mémorial érigé pour que jamais elles ne soient oubliées et que les générations présentes et futures s’y recueillent de temps a temps,
  • Le 2 octobre de chaque année soit reconnue et commémorée comme la « Journée du Souvenir pour Beni. »

d) Fournir l’assistance humanitaire aux rescapés des massacres et à la population locale

Chaque attaque dans la région de Beni fait des déplacés, des sans abris, des orphelins, des veuves, … Ils manquent de tous et viennent souvent se confiner dans des familles d’accueil qui elles mêmes n’ont pas assez des ressources à cause notamment du non accès aux zones de production et à un climat d’affaire hostile. En conséquence, plusieurs parents ne sont plus capables d’envoyer leurs enfants à l’école ou à l’université, leur assurer une restauration digne, répondre à leurs besoins élémentaires ou leur assurer un accès aux soins de santé. Il faut coute que coute alléger les souffrances des habitants de la région de Beni à travers notamment des mesures comme :

  • Apporter une assistance humanitaire multiforme et urgente aux rescapés directs des massacres avec une attention particulière pour les personnes vulnérables (femmes, enfants, PVH, …)
  • Renforcement de l’approvisionnement en médicament, l’équipement et le personnel de tous les centres de santé et hôpitaux publics afin de rendre pérenne la mesure de gratuité des soins de santé.
  • Réduire sensiblement les frais de scolarité dans les institutions secondaires ainsi que d’enseignement supérieur et universitaire situé dans la région de Beni,
  • Assurer la gratuité de l’enseignement primaire comme prescrit par notre constitution
  • Prendre des mesures visant le relèvement socio économique générale de la region (point II).
  1. RELEVEMENT SOCIO ECONOMIQUE DE LA REGION

Les attaques dans la région de Beni visent de plus en plus les zones et opportunités à fort impact économique. La zone de Mayangose, grenier agricole de la région de Beni est désormais inaccessible, des véhicules entiers transportant des marchandises sont incendiés, des biens de la population sont systématiquement pillés, … En plus de cette insécurité, il se constate une très forte pression fiscale et un manque criant d’entretien des routes principales et des dessertes agricoles. Ainsi, ceux qui par chance accèdent à leurs champs, n’ont parfois pas la possibilité d’évacuer leurs produits vers les centres urbains, site de consommation. Bref, c’est toute l’économie locale qui est ébranlée. Il est de ce fait important que les mesures suivantes soient prises :

  • La déclaration de la zone de Beni comme zone sinistré avec pour conséquence une exonération fiscale totale ou partielle de toutes les activités socio-économiques des habitants de la région ;
  • La construction la route nationale Numéro 2 (Kasindi-Beni-Butembo-Goma) et l’entretien régulier des routes des dessertes agricoles ;
  • L’électrification de la région et la subvention par l’Etat de la production, la transformation et la commercialisation de certaines filiaires agricoles (Cacao, huile de palme, maïs, café, quinquina, pomme de terre, haricot, …) afin de pallier au problème du chômage
  1. VAINCRE EBOLA

Monsieur le président de la République ;

Les centaines de morts d’Ebola, les attaques contre les infrastructures de prévention et de traitement d’Ebola, le refus de collaborer avec les équipes de riposte, les attaques contre les personnels intervenant dans la riposte auraient pu être évité si les acteurs impliqués et la communauté locale avaient posé les bases d’une riposte consensuelle et adaptée aux réalités locales et si les acteurs politiques, électoraux et sécuritaires n’avaient pas adopté une attitude négative face à Ebola. Les sorties médiatiques de certains politiciens mettant en cause l’existence et la source d’Ebola, la présentation d’Ebola comme motif du report des élections, le caractère stigmatisant même d’Ebola, l’intervention des forces de sécurité dans les activités (allant jusqu’à tué des habitants lors des refus de collaboration avec la riposte), le manque d’ouverture et de compréhension des recommandations pertinentes de la communauté, le manque de perspective d’une fin de l’épidémie malgré l’observation des consignes des experts sont entre autres des facteurs qui ont accentué la résistance communautaire contre la riposte. Cette résistance communautaire est regrettable, nous la condamnons et nous sommes pleinement engagés à la limite de ce que nous pouvons pour que de plus en plus des compatriotes comprennent qu’Ebola existe et qu’il faut le vaincre. Mais face à ces résistances, on constate du côté de la riposte, une machine lourde, lente et statique qui n’est bonne que pour retarder la fin de l’épidémie en donnant aux communautés des raisons de résister. Comment comprendre par exemple qu’à Nziapanda et KATHIRI, face à une communauté résistante, la riposte ait envoyé des militaires (ça aurait dû être des psychologues ou des promoteurs de la santé) pour mater la résistance, allant jusqu’à tué un jeune (Nziapanda) et une femme mère de six enfants (Kathiri le 04 Avril 2019) ?

Pour mettre fin à Ebola, les organisations humanitaires, le ministère de la santé et la communauté doivent devoir se mettre d’accord sur la suite à donner à la riposte pour la rendre efficace. L’expérience de Mangina et Beni a démontré que l’épidémie ne peut être maitrisée sans un engagement sérieux de toute communauté et une cohésion d’action des acteurs. Nous estimons que les actions suivantes doivent être menés en vue de lever les résistances et poser les bases d’une collaboration réussie entre les acteurs :

  • La construction dans les centres de santé publics situés dans chaque aire de santé d’un pavillon d’isolement où se feront les prélèvement et les premiers soins pour les malades suspectés d’Ebola avant d’être transférés au centre de traitement d’Ebola s’ils sont positifs. En effet, les gens ont de plus en plus peur d’aller se faire soigner dans les structures de santé par peur d’être transféré au centre de traitement d’Ebola pour une simple fièvre ou maux de tête ;
  • L’allocation d’assez des fonds dans la production et l’achat du vaccin afin de l’accorder à un suffisamment des personnes qui le veulent dans la communauté.
  • Une forte sensibilisation dans la communauté par des personnes recrutées à la suite d’une procédure transparente, juste et ouverte à tous et non sur base des liens amicaux ou familiaux comme le font certaines organisations ;
  • L’arrêt de l’utilisation des forces de sécurité dans la lutte contre Ebola car non seulement les policiers et militaires se sont rendus coupables de plusieurs dérapages regrettables dans le cadre de la riposte (dont des meurtres) mais aussi leur présence renforce le sentiment qu’Ebola est une épidémie imposée,
  • Un esprit d’ouverture et humanitaire de la part des intervenants dans la riposte contre Ebola.

Monsieur le président de la République,

Nous sommes confiants que si les propositions suivantes sont mis en œuvre, il est possible de redonner à notre région son statut de pool du développement de notre province et de notre pays ainsi que redonner à ses habitants le sentiment qu’ils font partie de ce pays. En tant que mouvement citoyen, nous faisons ce qui est de notre devoir pour que la bataille pour la restauration de la paix et la sécurité au Grand Nord Kivu, la relance du développement local ainsi que la fin de l’épidémie d’Ebola soit gagné. Votre implication sera un atout de plus pour que Beni-Butembo retrouve paix, prospérité et santé.

Fait à Beni, le 16 Avril 2018

Pour la LUCHA

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