Bulletin de LUCHA à propos de 6 mois premiers du Président : Felix Tshisekedi balbutie encore !

Mise en ligne le 1 août, 19 à 20:22


  1. Introduction

24 janvier – 24 juillet 2019 : 6 mois viennent de s’écouler depuis l’investiture de Félix Tshisekedi comme président de la République. Les Congolais ont placé beaucoup d’attentes dans le successeur de Joseph Kabila, en dépit des graves cafouillages ayant entaché sa proclamation comme vainqueur de l’élection. Ils sont très exigeants et très impatients de voir le changement, et ils ont raison !

6 mois c’est peu pour évaluer objectivement l’action d’une nouvelle administration. Mais c’est suffisant pour juger de l’existence ou non des signes d’une véritable rupture, et de l’élan pris ou non pour réaliser les attentes les plus importantes de la population. Cela est d’autant plus vrai dans le contexte Congolais, où Tshisekedi est arrivé au pouvoir après 18 années d’un régime criminel, prédateur et médiocre à tous points de vue. C’est dans cet esprit que nous avons évalué les 6 premiers mois de Félix Tshisekedi à la tête de la RDC.

Au lendemain de son investiture, La LUCHA a lancé la « Fatshimetrie », un baromètre pour mesurer l’action du nouveau président, dans le cadre de participation et du contrôle citoyens. Il s’agit de suivre et évaluer les engagements du nouveau président (redevabilité), mais aussi de formuler des propositions constructives. C’est un bilan non complaisant, mais dont le but principal est moins de blâmer que de susciter des correctifs dans l’action du nouveau président. Car au-delà des querelles politiciennes, en tant que citoyens nous souhaitons plus que tout que le Congo réussisse ! Qu’au cours des prochaines cinq années, les Congolais retrouvent la paix et la sécurité ; qu’ils retrouvent la confiance dans leurs institutions ; que leur situation économique et sociale s’améliore de façon remarquable ; que le Congo retrouve sa place et son honneur dans le concert des nations.

Ce bulletin ne saurait constituer un bilan exhaustif. Il s’attarde sur les décisions, les actions ou les absences de décision ou d’action les plus importantes soit dans leur nature, soit dans leur portée symbolique.

  1. Méthodologie du travail.

Dans le cadre de ce 2e bulletin, nous avons utilisé la méthodologie discursive, documentaire et l’observation participante. Les sources médiatiques et les réseaux sociaux ont été analysées afin de dégager une évaluation et un contrôle objectifs.

L’observation participante des décisions, actions, discours, déplacements, nominations, et réactions ou non à différents événements survenus en RDC (qu’ils soient d’ordre social, économique, politique ou sécuritaire) nous a permis d’apprécier les actions posées étant donné que nous sommes acteurs et citoyens bénéficiaires des probables changements. Cela a été ensuite confronté aux engagements pris par Félix Tshisekedi et son allié Vital Kamerhe durant la campagne électorale, mais aussi et surtout leurs programmes politiques.

  1. Les axes d’analyse de cette fatshimetrie

Cette analyse citoyenne sera axée sur quelques plans dont :

  • La Politique, les institutions et diplomatie,

  • La situation Sociale ;

  • Les Droits humains, la Justice et la lutte contre l’impunité,

  • La Sécurité ;

  • L’économie et l’environnement ;

Le tableau ci-après résume les aspects positifs et négatifs de ces 6 premiers mois du président :

Domaine/secteur

Positif

Négatif

Politique, institutions

et diplomatie

-Libération des prisonniers politiques et d’opinions ; Courte ouverture de l’espace politique :

Retour des opposants politiques notamment Moise Katumbi, Sindika Dokolo, Jean Pierre Bemba et Mbusa Nyamwisi.

-L’installation définitive du parlement (sénat et l’assemblée nationale) et les institutions provinciales ;

-Itinérance diplomatique du président de la république dans nombreux pays de la sous-région, l’Afrique et aux USA ;

-Nomination d’un Premier ministre,

-Implication du président dans le dossier des invalidations des députés nationaux par la cour constitutionnelle ;

– Nomination des mandataires de GECAMINES et SNCC ;

-Forte intention de combattre la corruption dans toutes ses formes dans les discours variés du président à l’interne et à l’externe ;

– Implication dans le dénouement de la crise politique au Sankuru où Lambert Mende voulait être candidat unique.

-L’absence d’un gouvernement 6 mois après l’investiture du Président suite à des longues négociations avec son partenaire du FCC avec lequel il a deal opaque. Fin juillet 2019, le FCC et le CASH ont annoncé être tombés d’accord sur la taille et la clé de répartition des postes dans le prochain gouvernement. Seulement, ce gouvernement sera de 65 membres dont 42 du FCC, et celui-ci conservera des ministères clés dont la défense, les finances, le portefeuille et les mines. Un tel gouvernement pléthorique et budgétivore n’est pas de nature à privilégier les besoins urgents de la population, mais les intérêts personnels de quelques individus ;

-Impunité pour les auteurs des crimes graves et des violations des droits humains parmi les acteurs politiques du régime Kabila ;

– Annonce des mesures populistes dans le domaine de l’amélioration de la gouvernance et de la redevabilité des gouvernants sans aucune action ou initiative concrète ;

-La répression systématique des manifestations publiques (celle de Lamuka le 30 juin à Kinshasa et à Goma avec mort d’homme à Goma, les manifestations pacifiques de LUCHA à Goma, Butembo, Beni, Tshilenge, et des autres groupes associatifs (les médecins à Kinshasa et les autres mouvements citoyens à Kinshasa) ;

-Restriction des déplacements de certains opposants (Idi Kalonda, Katumbi),

-Balbutiement et tâtonnement politique caractérisant les décisions et nominations par le Président : nominations basées sur la rétribution et moins sur la compétence (exemple : Gabriel Kyungu à la SNCF)

-Formation d’un cabinet présidentiel pléthorique (plus ou moins 200 personnes, avec les assistants), avec dans plusieurs cas des compétences douteuses, et avec un faible taux de femmes ;

Toujours pas de vision claire et précise ou de programme de gouvernement.

-Opposition volontaire par une ministre à l’exécution des ordonnances du président portant nomination à la GECAMINES et SNCC par une ministre et manque criant de sanction à son encontre ;

-Démission du ministre intérimaire de la santé suite à des divergences d’approche avec le président ;

-Une centralisation excessive du pouvoir et la passation opaque des marchés publics par la présidence de la République.

Social

-Implication personnelle du Président dans le suivi des activités de la riposte contre Ebola et la mise en place d’une équipe technique afin d’optimiser les résultats de la riposte contre la maladie à virus Ébola ;

-Lancement de certains travaux à impact économique et social rapide (routes, ponts…) dans le programme d’urgence de 100 jours. Lancement de la construction de sauts-de-mouton à Kinshasa pour réduire les embouteillages et organiser le trafic routier ;

-Interaction directe entre le président et la population : Bunia et Djugu, Kalehe), participation à des diverses journées avec les couches sociales, rencontre avec les médecins, audience avec des leaders des femmes et les diverses personnalités congolaises, les sportifs : boxeur champion du Monde, les lauréats des élèves, le soutien aux joueurs des équipes nationales léopards, etc. et contacts avec la diaspora lors de tous ses déplacements à l’extérieur ;

– L’annonce de la prise en charge des frais de soins de santé des militaires et policiers et leur dépendants mais cela restant assez limité dans son effectivité en dehors des grands camps militaires de Kinshasa;

-Réhabilitation du réseau d’adduction d’eau dans certains camps militaires (Tshatshi) ;

-Restitution de 15 000 FC sur le salaire des militaires depuis le mois de juin.

-Les travaux prévus dans le programme de 100 jours ne sont pas visibles et repérables dans les autres provinces sauf à Kinshasa ;

Certains délais de réalisation sont déjà et un déficit évident de la qualité/délai des travaux.

-Les autres actions prévues dans le programme d’urgence de 100 jours ne sont pas réalisés : pas des écoles construites, pas d’hôpitaux, pas d’emploi crées, amélioration de la desserte en eau et électricité etc.

-Le social des congolais n’a pas changé, la précarité sociale continue à frapper les citoyens congolais ;

-Les travaux de construction de quatre ports promis aux habitants de Kahele n’ont jamais été lancés ni peut-être pas pensés ;

-Les mesures claires et précises pour assurer la gratuité de l’enseignement primaire d’ici septembre ne sont pas prises ;

-L’épidémie à virus Ebola continue à s’étendre et menace gravement l’ensemble du pays et les habitants de Beni-Butembo et Goma détruisant le tissu social ;

-Des problèmes à résoudre rapidement comme la suppression du Go-Pass ou la réduction drastique du prix du passeport ne l’ont toujours pas été.

Droits humains, Justice,

Lutte contre l’impunité et la corruption

-Tenue des manifestations à caractère citoyenne et politique au début du quinquennat ;

-Discours répétés sur l’intention de lutter contre la corruption

-Fermeture progressive de l’espace politique par l’entremise des mesures liberticides ;

-Répression des manifestations pacifiques ;

-Impunité totale des militants UDPS responsables de casses et attaques au Kasaï et Kinshasa lors de la saga des sénatoriales et diverses manifestations spontanées ;

-Volonté affichée d’assurer l’impunité à Kabila et ses compagnons au nom d’une prétendue réconciliation ;

-Volonté manifeste de couvrir la corruption car les enquêtes ouvertes contre les corrompus et corrupteurs lors des élections sénatoriales n’ont jamais abouties ;

-Aucun audit de gestion n’a été diligenté dans les entreprises publiques et les ministères

Sécurité et stabilité

-Un engagement à mettre un terme aux massacres et insécurité sur toute l’étendue de la RDC ;

-Les mesures sécuritaires prises pour mettre fin à l’insécurité à Lubumbashi ont été efficientes ;

-Une descente sur terrain en Ituri pour chercher la solution aux conflits avec des opérations militaires déclenchées en Ituri ;

-Rapprochement du président avec certains leaders du Nord-Kivu pour tenter de mettre un terme aux massacres à Beni ;

-Les massacres à Beni ont continué avec un bilan lourd ces dernières semaines et les attaques violentes des groupes armés ADF et mai-mai ;

-Kidnappings et tueries massives des habitants à Goma, ;

-L’activisme des groupes armés dans nombreux territoires à l’Est,

-Les attaques répétées des équipes de riposte contre l’épidémie d’Ébola ;

-La poursuite des massacres à Djugu malgré les mesures sécuritaires prises ;

-Le commandement militaire reste dans les mains du général Amisi Gabriel Tango Fort ; sanctionné pour crime contre l’humanité, et de John Numbi, lui-aussi sanctionné ;

-Le président n’a pas toujours pas installé le quartier général de l’armé à Beni et lui-même ne pense plus s’installer à l’Est du pays comme il s’y était engagé.

-Déploiement de l’armée dans les sites miniers artisanaux au Haut-Katanga et Lualaba pour chasser des milliers de creuseurs artisanaux sans aucune alternative.

Économique, financier et l’environnemental

-Ouverture de l’espace économique aux investisseurs étrangers ;

-Présentation des potentialités économiques du pays aux CEO à Kigali, à Abuja au Nigéria et aux États-Unis lors de la visite de travail ;

-Participation du président au sommet sur le climat à Nairobi pour valoir les enjeux et intérêts de la RDC sur la lutte contre le changement climatique,

-Dépassement budgétaire de la présidence en seulement six mois ; dépassement budgétaire de la primature ;

-Dépenses inconsidérées, excessives et non budgétisées violant la loi sur les finances publiques (LOFIP) ;

-Passation et attribution des marchés publics par la méthode gré à gré (avec des entreprises naissantes sans aucune expérience) violant la loi sur la passation des marchés publics de 2010 ; ceci limite la transparence et accroit les risques de corruption et de pot-de vin ;

-Les voyages du président ont des conséquences budgétaires importantes (plus de 15 millions de dollars dépensés en 6 mois) ;

-Les investisseurs étrangers tardent à venir faire des affaires au pays, aucun acte concret n’ayant été posé afin d’assainir le cadre des affaires

  1. Conclusion et propositions

  1. Le bilan de ces 6 premiers mois est donc non concluant et inquiétant.

  2. Il y a eu peu des signes encourageants, essentiellement sur le dialogue entre l’institution président de la république et les citoyens.

  3. Le Président Félix Tshisekedi poursuit la consolidation de sa coalition avec Joseph Kabila en lieu et place de poser les bases d’un mandat de rupture en déboulonnant l’ancien système comme il l’avait indiqué aux États-Unis. Les citoyens devront encore attendre longtemps pour voir leur situation s’améliorer car cela n’est pas la préoccupation du Président pour l’instant.

  4. « Le peuple d’abord » n’a jamais été le slogan des partenaires politiques du nouveau président, Le FCC. Le « ventre d’abord » risque de l’emporter !

  5. Les réformes attendues seront peut-être engagées à partir de 2020 car la formation et l’installation du futur gouvernement « budgétivore » pourraient aller jusqu’à janvier 2020. Donc 1 année de moins dans cette législature.

Le Président Félix Tshisekedi doit comprendre que son premier patron c’est le peuple Congolais. C’est ce peuple dont il faut craindre l’impatience et la révolte au cas où ses attentes ne sont pas satisfaites.

La satisfaction du peuple congolais doit devenir sa première et sa seule obsession.

Nous l’encourageons notamment à :

  • S’assurer que tous les membres de son cabinet, les membres du nouveau bureau de l’assemblée nationale et du sénat, les nouveaux gouverneurs, les futurs membres du gouvernement, les hauts responsables de l’armée et l’ancien président de la république… déclarent leurs patrimoines conformément à la constitution et au code de conduite de l’agent public de l’État, et qu’une politique de tolérance zéro pour la corruption cesse de devenir un simple discours pour être appliqué rigoureusement ;

  • Mettre rapidement en œuvre un programme cohérent de démobilisation, désarmement et réinsertion des combattants qui quittent les groupes armés, et définir une politique cohérente, efficace de réinsertion sociale afin de limiter le recyclage des criminels dans l’armée et la police nationales ;

  • Initier des réformes profondes et nécessaires dans le domaine de l’enseignement, la santé et l’administration publique afin d’assurer le bien-être collectif et une réelle justice sociale ;

  • Mettre rapidement en œuvre la réponse multisectorielle à l’épidémie d’Ébola, avec des moyens conséquents ;

  • Commanditer rapidement l’audit indépendant de la gestion financière et de la gestion des personnels de toutes les institutions, les établissements publics, entreprises publiques, et les administrations publiques au niveau national et provincial ;

  • Former rapidement le gouvernement constitué des membres éthiquement irréprochables sur le plan de droit humain, de crimes économiques, de corruption ou d’autres crimes ;

  • Initier une gouvernance basée sur la performance, avec la signature de contrats de performance et leur évaluation régulière (au moins deux fois par an) avec tous les responsables gouvernementaux, de la base au sommet ;

  • Initier des états généraux dans les secteurs clés de la vie nationale (sécurité, éducation, santé, infrastructure, environnement, industrie, agriculture, élevage, services financiers…) en vue de dégager des actions à court, moyen et long terme pour son administration, et les mettre effectivement en œuvre avec la complicité des acteurs concernés ;

  • Mettre en place un programme d’encadrement des jeunes désœuvrés sur l’ensemble du territoire national afin de les former aux métiers et canaliser leur énergie à contribuer à la productivité et au développement des infrastructures de la RDC ;

  • Initier rapidement la réforme de la constitution, de la loi électorale, de la CENI et de la justice en vue de renforcer la démocratie participative, la transparence, la légitimité et la foi des citoyens.

  • Initier le recensement général de la population et l’octroi de cartes d’identité digitales aux citoyens Congolais, et mettre ainsi un terme à l’anomalie d’un pays sans fichier national des citoyens et sans cartes d’identité depuis plus de 20 ans.

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